look THE "Ring"...Attention, c'est pas du toc!
Une œuvre qui est restée unique dans les annales de l'opéra et de la musique classique, même le XXème siècle n'a pas fait mieux!
Wagner a écrit tous ses livrets, dont ceux du Ring, un peu plus de 8000 vers au total (je l'ai lu, je n'ai pas compté), entre 14h00 et 15h00 de musique et de chants, selon les interprétations (nul doute que Toscanini aurait pu descendre à 12h00), un prologue qui dure tout de même 2h30, et trois "journées" chacune de 4h00 à 4h30, une composition sur 20 ans, avec une interruption pour échapper aux créanciers et une autre pour composer 2 opéras:
Dans l'ordre:
- L'or du Rhin (Das Rheingold)
- La Walkyrie (Die Walkürie)
- Siegfried
- Le Crépuscule des dieux (Der Gotterdämmerung)
Les sources utilisées pour Wagner sont des poèmes ou des récits nordiques et germaniques dont les plus anciens remontent à l'Edda en prose et l'Edda en vers, recueils de saga nordiques du VIIème et du VIIIème siècle (notamment pour les aventures de Siegfried/Sigurd chez Gutrune, et la construction par les géants du Valhalla dans le prologue)...
Curieusement, la composition de la musique a été faite dans l'ordre des opéras, mais celle du livret dans l'ordre inverse.
Bref, l’œuvre complète a été créée au premier festival de Bayreuth, à la mi août 1876, après une présantation séparée en 1869 et 1870 (je crois) de deux des quatre oeuvres.
Pour son cycle, Wagner a mis en place une véritable grammaire musicale, avec plus d'une centaine de mélodies correspondant soit à un personnage (Wotan, Siegfried, Fafnir...), soit à un objet (l'anneau, le Tarnhelm, la lance de Wotan, la forge...), soit à un sentiment ou un état (la servitude, l'amour, la rédemption par l'amour), ou bien la nature et ses manifestations (arc en ciel, tonnerre, murmures de la forêt, chant de l'oiseau, le Rhin)...bref, ces thèmes musicaux, appelés leitmotiv, en se répétant, se combinant, se dégradant donnent au cycle son unité musicale et colorent chaque scène, renseignent sur l'état des personnages, leur psychologie (Brünhilde amoureuse, Siegfried insouciant, Wotan en colère, Fafnir qui se réveille...).
Un outil utile pour bien comprendre pourrait être ce coffret de CD. Les deux premiers sont dispensables mais se laissent écouter (il y a mieux dans les interprérations) mais le dernier, reprenant la plupart des Leitmotiv et parfois leurs combinaisons, et en les expliquant est des plus instructifs:
En complément, cet ouvrage qui comporte les livrets des 10 opéras de Wagner, une explication et une discographie (la dernière édition est de 1994, la mienne est de 1988) est également un allié précieux:
Alors côté discographiques, que choisir? Je n'ai pas tout écouté. J'ai en disque les 3/4 de la version "Decca/Solti" (et qobuz me donne accès à celui qui me manque), la vesion "DGG/Karajan" et la version "Philips/Boehm". En CD, j'ai également une version de Sawahllisch, de 1989, qui ne me semble pas fameuse, et le Siegfried de la série testament (Bayreuth, 1955, Keilberth à la baguette, superbe!). Ce dernier n'a jamais paru en vinyle, mais la série testament (et parfois d'autres) ont pu éditer en CD certaines des prises de son de Bayreuth, le festival ayant été toujours enregistré depuis 1951(en tout cas les trente premières années je pense). Donc le matériau existe.
La première maison de disque à avoir entrepris de graver le cycle de l'anneau dans son entier a été Decca, qui a confié à Georg Solti le soin de diriger la chose. Les opéras ont été enregistrés et sont sortis entre 1959 et 1965. En 1959, certains opéras avaient déjà été gravés et publiés, sans compter les recueils d'extraits publiés dès les années 20, mais aucun label ne s'était risqué à l'intégrale du "ring". Walter Legge, le producteur qui à l'époque a pris Karajan sous contrat, chez EMI, est très sceptique et promet à l’initiative un désastre commercial.
Pour cet enregistrement, Solti a non seulement rassemblé la crême du chant wagnérien de Bayreuth (Hans Hotter, Wolfgang Windgassen, Régine Crespin, Georges London, Birgitt Nilson, Kirsten Flagstad et bien d'autres...) ou d'ailleurs (Dietrich Fisher Diskau qui fera un très sérieux Gunther dans le crépuscule), mais il a également pris soin de faire refabriquer certains des instruments spéciaux utilisés par Wagner, en particulier les tubas, la machine à tonnerre...bref.
La prise de son est excellente, non seulement pour l'époque mais aussi dans l'absolu, avec des colorations et des diversités de timbres que j'apprécie beaucoup, une puissance d'évocation et une puissance tout court, une profondeur que l'on a du mal à retrouver dans les éditions suivantes. On le trouve sous le label Decca, mais également, pour sa commercialisation aux USA, sous le label London/FFRR. C'est cette dernière édition dont j'ai les trois quart, il me manque Siegfried, mais j'irai à la chasse à la rentrée. J'ai trouvé le Rheingold pas plus tard que samedi à "La Dame Blanche" à Paris. C'est, pour ma part, la version que je préfère des tétralogies que j'ai pu entendre.
Pour avoir pu comparer un "Walkyrie" decca européen un poil plus récent et la version "London", il se trouve que la version sous label "London" me convient mieux...
Une fois le succès assuré de la version "Solti/Decca", le concurrent DGG (et sans doute Walter Legge, justement) a confié à une de ces stars maisons, Karajan, le soin d'enregistrer, de 1966 à 1970, le cycle complet. Karajan a pris le parti d'un orchestre un peu plus réduit, et quasiment les mêmes interprètes, puisant également largement dans le vivier des chanteurs habitués du festival de Bayreuth. Ses enregistrements ont été primés en Allemagne et en France, et c'est également une version que j'aime beaucoup, par la clarté de son expression. Tous mes exemplaires sont des pressages allemands, et j'en ai eu certains encore scellés, un est numéroté!
Enfin, la version de Karl Boehm, publiée par Philips en 1976 pour le centenaire de Bayreuth, est la première prise de son publique (au festival de Bayreuth) complète du Ring à avoir été gravée sur vinyle. L’enregistrement date de 1966, et des trois versions, c'est celle que j'apprécie le moins... A suivre pour vous parler de chacun des opus